Licenciement individuel
Quels sont les motifs pour lesquels un employeur peut licencier un salarié ? Quelle est la procédure à respecter ? Quelles sont les indemnités auxquelles le salarié peut prétendre ? Quid de la contestation du licenciement devant le Conseil des prud’hommes ?
Définition du licenciement pour motif personnel
Le Code du travail distingue deux grands types de motifs :
- Le motif personnel, qui repose sur la personne du salarié et des faits qui lui sont imputables (faute) ou découlent de sa situation individuelle (inaptitude, insuffisance professionnelle…)
- Le motif économique, qui à l’inverse ne repose pas sur la personne du salarié mais sur la situation économique plus globale de l’entreprise et une cause telle que des difficultés financières, la nécessité de s’adapter pour sauvegarder la compétitivité, la cessation d’activité ou l’introduction d’une nouvelle technologie (L1233-3)
Le licenciement pour motif économique peut être collectif, avec l’obligation de consulter le CSE voire d’établir un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) lorsqu’au moins 10 licenciements sont envisagés sur une période de 30 jours dans une entreprise d’au moins 50 salariés.
Il peut également être individuel dès lors qu’il relève bien de la définition du motif économique (L1233-3) :
- Il affecte un poste dans l’entreprise (suppression, transformation, modification)
- Sa cause découle du contexte économique (difficulté financière, nécessité de s’adapter pour sauvegarder la compétitivité, cessation d’activité, introduction d’une nouvelle technologie)
Le licenciement pour motif personnel est toujours individuel (L1232-1). Il peut découler de causes très diverses. Voici les principales causes que l’on rencontre en pratique :
- Le licenciement disciplinaire qui repose sur une faute du salarié : elle peut être simple, grave (dans ce cas, elle justifie le départ immédiat de l’entreprise ; ex : un harcèlement moral, manquement important et/ou répété à une obligation professionnelle) ou lourde (elle consiste dans l’intention de nuire à l’entreprise ; ex : sabotage, détournement de clientèle) ;
- L’insuffisance professionnelle qui repose sur l’incapacité du salarié à exercer correctement ses missions sans qu’il s’agisse d’une mauvaise volonté de sa part ;
- L’inaptitude qui découle de l’impossibilité de trouver un emploi dans l’entreprise qui satisfait aux exigences liées à l’état de santé du salarié, après déclaration du médecin du travail.
La procédure de licenciement
La procédure de licenciement individuel se composera toujours des trois phases suivantes :
- Convocation à un entretien préalable, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge (le formalisme de la convocation)
- Déroulement de l’entretien, qui ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation de la convocation et lors duquel le salarié peut se faire assister soit par un salarié de l’entreprise, soit, en l’absence de représentants du personnel, par un conseiller du salarié extérieur à l’entreprise
- Notification du licenciement, par courrier exposant le motif de la décision, qui ne peut être adressé moins de 2 jours ouvrables après la date de l’entretien préalable
Si le licenciement est justifié par une faute, la notification doit être envoyée dans le mois qui suit l’entretien.
Dans le cas d’un licenciement pour inaptitude, cette procédure est précédée d’une obligation de reclassement. L’employeur doit chercher à éviter le licenciement en recherchant un poste de reclassement adapté au salarié.
Le médecin du travail peut dispenser l’employeur de cette recherche dans son avis par une mention spécifique. Si le médecin ne dispense pas l’employeur de cette recherche, le CSE est consulté sur le poste de reclassement envisagé avant qu’il soit proposé au salarié.
Point important : la convocation doit énoncer son « objet », c’est-à-dire qu’un licenciement est envisagé. Toutefois, l’employeur n’a pas l’obligation de détailler les raisons pour lesquelles il en arrive au déclenchement de cette procédure. Le salarié n’a pas accès à son dossier et aux pièces dont dispose l’employeur. En pratique, la préparation de l’entretien peut s’en trouver très troublée notamment dans le cas d’un licenciement disciplinaire où le salarié se rend à l’entretien sans idée précise des reproches qui lui seront adressés !
Les droits du salarié licencié
Les droits vis-à-vis de l’entreprise
Le salarié licencié aura droit à :
- Un préavis (L1234-1) :
– La durée du préavis est fonction de l’ancienneté : 1 mois pour une ancienneté comprise entre 6 mois et 2 ans ; 2 mois pour une ancienneté supérieure à 2 ans.
– Il n’est pas du en cas de faute grave ou lourde.
– Il est fréquent que la Convention collective applicable prévoit des dispositions spécifiques, qu’il convient d’appliquer si elles sont plus favorables pour le salarié.
- Une indemnité de licenciement (L1234-9) :
– Il faut compter au moins 8 mois d’ancienneté pour la percevoir.
– Son montant sera déterminé selon la formule suivante : 1/4 de mois de salaire par an pour les 10 premières années d’ancienneté ; 1/3 de mois de salaire par an pour chaque année au-delà de 10 ans d’ancienneté.
– Le salaire de référence est la moyenne des rémunérations perçues lors des 12 derniers mois ou des 3 derniers mois, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié.
– Voici un simulateur qui permet de faire une estimation de son indemnité : simulateur
– Elle n’est pas due en cas de faute grave ou lourde.
– Il est fréquent que la Convention collective applicable prévoit des dispositions spécifiques, qu’il convient d’appliquer si elles sont plus favorables pour le salarié.
Nous ne faisons pas état des spécificités concernant les salariés à temps partiel ou les salariés licenciés pour inaptitude à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ou certains droits accessoires au licenciement pour motif économique (la priorité de réembauche).
- Une indemnité de congés payés, qui correspond au reliquat de congés payés qui n’ont pas pu être pris avant le départ du salarié (L3141-28).
Les droits au chômage
Le salarié licencié aura droit au chômage, s’il remplit les autres conditions pour en bénéficier (l’allocation chômage), dans tous les cas, même lorsqu’il est licencié pour faute grave ou lourde.
S’agissant de l’inaptitude, il faut préciser que le bénéfice du chômage est réservé au travailleur apte physiquement à l’exercice d’un emploi. Toutefois, l’assurance chômage considère que l’inaptitude constatée dans une entreprise ne saurait être regardée comme une inaptitude du salarié à occuper tout emploi dans une autre entreprise (Circulaire n° 2021-13 du 19 octobre 2021, P. 18). Il peut rechercher un autre emploi, donc il peut percevoir le chômage.
La contestation du licenciement
Le salarié dispose d’un délai de 12 mois, à compter de la notification du licenciement, pour contester la mesure devant le Conseil des prud’hommes (L1471-1).
En 2017, le législateur a introduit une phase lors de laquelle le salarié peut demander à l’employeur, dans un délai de 15 jours après la notification, de préciser le motif du licenciement. Le salarié n’a pas l’obligation de faire cette demande. Elle peut cependant faciliter sa stratégie. Il a donc tout intérêt à consulter rapidement un avocat pour définir la ligne de conduite à suivre (L1235-2).
La contestation peut porter sur la forme.
L’irrégularité de procédure permet au salarié de demander une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire, lorsque le motif du licenciement reste justifié.
Elle peut aussi porter sur le fond, le salarié contestant le motif de licenciement allégué par l’employeur.
En cas de succès, l’indemnisation du fond absorbe celle des éventuelles irrégularités de forme et le Conseil des prud’hommes ne prononce qu’une seule indemnité.
La question porte alors sur le « caractère réel et sérieux » du licenciement. Les débats interrogeront d’une part, le caractère objectif, factuel et vérifiable du motif invoqué par l’employeur et, d’autre part, le fait que ce motif soit suffisant pour justifier de priver le salarié de son emploi. Chaque type de motif s’analyse selon des critères qui lui sont spécifiques et qui ont fait l’objet d’une jurisprudence abondante.
Si le licenciement n’est pas justifié, le juge peut proposer la réintégration du salarié. Si le salarié ou l’employeur la refuse, le salarié percevra une indemnité pour « licenciement sans cause réelle et sérieuse ».
Depuis 2017, cette indemnité est enfermée dans un barème qui tient compte de l’ancienneté du salarié et du montant du salaire (L1235-3). Ce barème n’est toutefois pas applicable dans certains cas (violation de la protection de la maternité, du statut de salarié protégé, d’une liberté fondamentale, discrimination et harcèlement moral ou sexuel) et les sanctions sont alors bien plus lourdes avec un possible droit à réintégration qui peut s’imposer à l’employeur.
La nouveauté du barème réside dans un abaissement drastique des planchers de 0 à 3 mois, contre 6 mois auparavant, sauf exception, et dans la mise en place de plafonds qui n’existaient pas avant. Par exemple, pour un salarié qui a 5 ans d’ancienneté, son indemnité devra être comprise entre 3 et 6 mois de salaire. L’ancien plancher est devenu le plafond !
Très contesté, ce barème a été conforté par la Cour de cassation qui le juge suffisamment dissuasif pour limiter le risque de licenciement injustifié (Cass. soc. 11 mai 2022 et 1er février 2023). Cette solution reste très discutée.
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